Une maison détruite dans la vallée de la Vésubie

Un article de Françoise Dhénin-Davenat paru dans la revue SIDKAR de l’ASF

Chers amis lecteurs mon pilote et moi ne sommes pas d’accord, lui veut du hard, du roots, du tarmo quoi et moi du poétique, de la délectation, de la philosophie dans mon récit. Lui enfourcher la bête et moi ronron panier… Oui mais s’il est le maître suprême sur son engin quand il monte son destrier…euh… c’est moi qui écris l’article, non mais !

Jour 1

Bien que la langue française soit riche, voire très riche, je manque de superlatifs pour vous narrer notre dernière escapade. Je suis en train de construire dans ma tête qui explose de joie littéralement une espèce de bibliothèque du coeur où je puis ranger mes souvenirs absolument merveilleux, les uniques, les rares, ceux qui sont là maintenant, présents à jamais. Bien sûr vous reconnaissez non ?

Traversée de Cannes le 15 août… Aïe ! Je sens mon pilote bouillir un peu, déjà qu’il fait une chaleur de ouf !

Eh oui les toutous sont là mais peu m’importe finalement car je sais que ce qui m’attend est fantastique et surtout je ne conduis pas l’engin alors cela m’est égal ce qui n’est pas le cas du “driver boss”. Pas de photos des gorges de la Vésubie car j’ai préféré les savourer avec mes yeux ébahis et m’enivrer non pas avec un verre mais tous les verts que dame nature m’offrait jusqu’à notre premier arrêt dans un ravissant village paisible si accueillant et surtout presque désert : Utel

Bah oui le chauffeur est sobre, moi aussi, enfin le midi…

Sir Emmanuel the road lord comme j’aime à l’appeler, connu comme le loup blanc dans le bled décide du premier stop et de nous attabler pour pause et se repaître d’un steak. Un cagnard à tuer mais moi monsieur j’ai fait la colo et le pilote itou donc nous survivrons. Allez plus haut pour rencontrer “the” Madone of Utel, normal un week-end de 15 août. Moi l’impie marquée par une éducation judéo chrétienne, donc avec quelques séquelles de catéchisme… Elle est bien montée au ciel ce jour-là non ? Oui et ben hein, moi aussi suis “allée plus haut” (dixit Tina Arena pour les connaisseurs et sseuses). Et là, toupie !!!

Du 360° toujours en compagnie de la star des stars la plus photographiée à chaque arrêt et nombre de gestes de sympathie sur son passage : Mister URAL ce qui oblige mon conducteur à raconter l’histoire complète de cette machine,date, histoire à chaque stop et je vous en passe faisant de lui un présentateur digne d’un JT car il maîtrise le sujet” l’animal” plus connu d’ailleurs sous le surnom de : Lapin !

Même si parfois il n’a pas envie de répéter l’histoire de ce sublime Ural Ranger 2012, son ego se valorise avec la cour d’admirateurs et d’admiratrices qui encercle “the beast”. Si lui est un “lapin” moi je suis un singe donc dans mon panier, mais je ne suis pas là pour faire ronron dedans, (vous me direz un singe qui fait ronron c’est plutôt rare et encore moins dans un panier). Je danse !

Même si mon pilote me “domine” (du haut de son engin seulement hein ! ) …sans moi le sidecare lèverait. Donc je sers à quelque chose quand même mais ne puis en aucun cas rivalisera avec L’Ural, toujours l’Ural en vedette non-stop tous les jours, toutes les heures, tous les arrêts…M’enfin ça suffit là ! Bon d’accord suis pas jalouse “moi”,surtout d’une si belle machine mais quand même… En fait, il est encore plus chouette quand je suis dedans non ? Mes chevilles vont bien merci !

Heureuse d’être dans un autre monde et ce que j’aime avec “la folie c’est qu’elle ne s’empare que des gens sains d’esprit” (Annick Moisan) La Vésubie c’est aussi ça hélas… Mais aussi des petits lieux au détour d’un virage racontant une histoire, avant la fin de cette journée privilégiée…oui c’est le mot car : “J’ai décidé de prendre mon bien être en urgence et non mon mal être en patience ” ! Et avec un run ça marche, avec un rhum aussi d’ailleurs !

Jour 2

Certains vont de ville en ville, nous ce sera de cols en cols… des cols pour Françoise. Celui-là je ne peux pas le rater, donc Françoise décolle…oui je sais il n’est pas exceptionnel mais n’oubliez pas que je voyage au ras de la route dans mon panier fort confortable au demeurant, donc au ras des pâquerettes et que je ne suis qu’un ouistiti, du nom de Garatakeu. L’avion à côté ne m’a jamais offert cette sensation inouïe, envahie je suis par…par quoi d’ailleurs ? L’absolu ressenti du bien-être, total, une inaccessible étoile… Qui sait ?

Au fur et à mesure de l’ascension (bravo au pilote car il faut avoir quelques années de vol et il en a) je pénètre dans l’allégresse et l’irréflexion, le détachement de l’intérieur afin de m’emplir des éléments extérieurs que je cueille sans modération aucune. Toute la différence est là entre “the flying crew” et les rampants. J’ai trouvé le mot exact que je cherchais : L’équanimité qui est une disposition affective de détachement et de sérénité à l’égard de toute sensation ou évocation désagréable. Mon pilote hors pair, the boss, the road lord va encore râler parce que suis trop littéraire et poétique. Oui bon chacun son truc lui il est né à califourchon sur un engin qui fait du bruit et moi…Euh on s’en fout !

Évidemment quand on est au sommet et que le ciel est à portée de cœur, il faut redescendre…Sur terre ? Je peux en roulant presque toucher les épilobes que j’effleure avec mes yeux et dont l’arôme titille délicatement mes narines. Ivre de douceur, de paix, de tant de beauté palpable, je m’en remets totalement avec une grande admiration et totale confiance en le lapin qui a dans les bras 600 kg…Trop trop fort “the hell tarmo” dont les camping caristes ne sont pas ses cousins. Parce que : “Real men drive a side car”.Mouais… laissons-le à ses illusions !

“Vivre meilleur plutôt que vivre mieux” ! Jusqu’à la fin de mes jours c’est juré craché.

C’est durant cette descente que nous fûmes doublés par trois autres animaux appelés blaireaux, qui mettaient les watts et qu’un d’entre eux s’est bel et bien viandé au virage suivant, heureusement dame nature avait dégagé le terrain et il n’y eut aucun bobo. Quel poireau ! Une vraie ménagerie, cette route, un lapin, un blaireau, un singe, une pie !

Bon nous sommes donc descendus dans la vallée et une fois en bas que fait on? Et bien on remonte à la découverte d’autres paysages, d’autres sommets et pas n’importe lequel, le plus haut d’Europe où on retrouve comme ils aiment à le dire, entre eux, “les autres seigneurs de la route” avec qui on échange dans le respect et le rire. Top ambiance là, épicétout !

La monotonie c’est quoi ? Je l’ignore totalement, en tout cas moi je ne “monotone” pas du tout car la variété est l’épice de la vie qui lui donne sa saveur particulière. Comme le dit si bien Paulo Coelho : ” Si vous pensez que l’aventure est dangereuse,essayez la routine… Elle est mortelle!”

Vous voyez ce rai de lumière sur la première photo ? Normal quand une divinité se balade, elle est bénie des dieux !!! (Je parle de moi là hein ?) Les chevilles du singe vont bien celles du pilote je n’en sais strictement rien bien qu’étant assez proches de mon nez. Rencontre dans la descente de passionnés de Harley d’un autre âge, évidemment solidarité oblige, évidemment papotage, bricolage. Et on dit que les femmes sont bavardes? Même pas vrai !

Revenons à nos casques et là encore traversée d’un village nommé Cocody. Surprise totale ! Comprendront les anciens d’Afrique comme nous et qui sait parmi les lecteurs… Quelle journée !!! Que je qualifie forcément de divine ! Après une nuit de repos je ne sais pas pourquoi mais je sens bien qu’on va remonter quelque part et que la journée s’annonce une fois de plus hors du commun comme je les adore, unique, décoiffante (quoiqu’avec le casque c’est déjà fait), ébourrrrriiiiffante… Youhouh !

Mais Zazie le dit mieux que moi :

Allez hop

Tu es libre alors

Oui, libre encore !

Allez hop

Speed encore !

Bats mon coeur

Cogne et sors

De ce corps

Fait chaud chaud, mais qu’importe il y a toujours une fontaine pour se rafraîchir en contrebas d’un paysage beau, beau, beau (nan nan pas con à la fois). Et je vous dis du fond du coeur : “Le roi n’est pas mon cousin” ! Savez-vous de quand date cette expression d’ailleurs ? Popularisée en 1690, cette expression renvoie à l’image que représente la plénitude du bonheur. En effet, s’il est de notoriété publique qu’un roi est forcément au summum du bonheur, alors ne pas être son cousin renvoie au fait que l’on est tellement heureux que le roi lui-même n’est pas digne d’être l’un de nos parents proches.

Jour 3

Je le savais, je le savais qu’on allait regrimper quelque part ! “Il faut qu’ça bouge, il faut qu’ça tremble, il faut qu’ça transpire encore” comme le dit si bien Clara Luciani. Yes let’s go ! Et bien je suis sincèrement plus que gâtée à ce sujet. Figurez-vous que mon exceptionnel pilote, the extraordinary rabbit, m’emmène au “Pont de la mariée” et à lire la légende, j’ai intérêt à me tenir tranquille, on ne sait jamais au cas où il me remplacerait par un sac de sable après m’avoir balancée par-dessus bord à cet endroit. Vertigineux le lieu !

Comme je rédige ce post c’est que je suis toujours en vie et qu’en tant que”sideuse-careuse” ma compagnie lui est supportable… Mouais, enfin je suis une femme quand même donc forcément chiante pour unhomme, mais ceci est un autre débat qui n’a aucun intérêt au demeurant tout de suite tout de suite ! J’aime la symbolique d’un tunnel car toujours la lumière est au bout.

Dans une boucle du fleuve du Var apparaît la citadelle érigée par Sébastien Le Prestre plus connu sous le nom de : Marquis de Vauban. A vos souvenirs d’histoire !!! Donc après avoir passé la Porte Royale et son pont-levis, le 17ème (pas l’arrondissement hein ?) nous attend : Ruelles étroites, souterrains et anciens cachots, maisons hautes et échoppes,ponctuées de placettes et fontaines. J’ai faim !!! Arrêt au détour d’une charmante ruelle pour s’attabler devant la spécialité du coin. Huuuuuuummmmm trop bon !

“Chaque jour de ta vie est un feuillet de ton histoire que tu écris”.

Hey Vauban, il n’y a pas que toi qui a une histoire marquante ! M’enfin !

Première photo : Un visage couché au lac de Sainte Croix, la dernière un cœur gravé dans la roche. Somptueuses et inclassables Gorges du Verdon ! C’est aussi dans mon cœur, mon esprit,mon âme, que ce périple est enserré à jamais comme une pierre précieuse en ses griffes.

Je me suis délectée de ce séjour qui empruntait les chemins de traverse et me fait dire qu’il n’y a plus de solitude là où est la poésie qui désormais m’accompagnera à chaque fois que je mettrai en route le projecteur de mes souvenirs à l’écran de ma vie. Un peu triste quand même quand s’achève le merveilleux, mais : “C’est à cause que tout doit finir que tout est si beau.” Charles Ferdinand Ramuz.

Françoise Dhénin-Davenat

2 commentaires sur « Une maison détruite dans la vallée de la Vésubie »

  1. Bonjour Françoise,

    Votre prose m’a laissée pantoise… J’ai adoré votre article d’autant que j’ai reconnu les cols à vos descriptions sans aucun doute poétiques mais tellement véridiques !!! Nous les avons fait en moto avant l’acquisition de notre Olga. “Heureuse d’être dans un autre monde et ce que j’aime avec « la folie c’est qu’elle ne s’empare que des gens sains d’esprit “. Magnifique vérité !
    Nous avons rejoint la grande famille des Uralistes en 2020 avec l’achat de la monture de nos rêves. (Depuis mon voyage en Russie en 1988, j’en rêvais, j’avais gardé dans un des bacs de mon Frigo à SouvenirS celui de ces femmes coiffées de fichus colorés qui pilotaient ces engins, extraordinaires à mes yeux, dans la campagne russe chargés de tomates, de concombres et même de poules !!!) Mais jusqu’à présent, “travail” oblige, nous n’avons fait que de mini raids ds nos belles Ardennes belges…. Mais quel bonheur, même si nous étions à quelques kms de notre village, nous avons toujours eu le sentiment d’être allé au bout du monde…. Notre “Olga” est magique…. Et être le “singe” ds le panier me ravit, de là il est possible d’admirer les beautés de la nature d’une manière à nulle autre pareille !!!

    Amitiés de Belgique,

    Marie France la Cochonette et Patrick le “Svinia” (cochon en Russe !)

    1. Marie France je vous remercie pour votre gentil et joli message et je sais que votre ressenti sera identique au mien s’il ne l’est déjà.
      Je vous souhaite le meilleur sincèrement lors de vos futurs runs.
      Avec vous de tout ❤️.

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